Le photographe en quête de /Nature/ est condamné à l'errance ; où qu'il aille, il ne trouvera pas de site dont la configuration ou les accès n'aient été balisés par l'activité humaine. Ce faisant, sa raison d'être lui est arrachée : il voulait faire acte de créateur ou d'aventurier en transformant un paysage brut en expression personnelle, et se découvre encombré par la vision d'un autre. Précédé par la pioche et le plan, il ne lui reste, souvent, que la mystification et le hors-champ pour prétendre à la naturalité. « Inverse kinematics » s'intéresse à cette tension entre différentes manières de faire paysage : la transformation physique des lieux, le déplacement contraint de l'observateur, la pratique décomplexée d'une photographie transformatrice. Cet essai-photo à la première personne propose trois mini-séries commentées par des fragments de notes : - « Trous et tas » explore le site de l'ancienne mine de houille de Decazeville, ainsi que l'immense terril de sel issu du traitement de la potasse dans la ville allemande d'Heringen. - « Sur la ligne » est consituée de clichés pris par la fenêtre de TGV. - « Inverse kinematics » constate l'échec de l'aspiration à l'authenticité, et propose une fuite dans l'artifice, l'archivistique, le fétichisme technologique. Un seul projet résiste : renoncer au témoignage pour goûter à l'expérimentation joyeuse sur le paysage. Il n'est rien que l'on désire plus que guider le regard de l'Autre.